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À partir du XVIIIe siècle, le cheval attelé s’est peu à peu imposé dans les villes, comme moyen de transport dédié aux marchandises et aux personnes. En plein XIXe siècle, dans les rues de Paris, les chevaux dévolus au transport étaient alors environ 100 000, parmi lesquels 15 000 servaient exclusivement à la Compagnie des omnibus. En 1880, 78 906 chevaux, ânes et mulets déambulaient dans les rues de la capitale. Attelés, ils pouvaient tirer une multitude de voitures différentes : tramway, phaéton, berline, araignée, calèche, coupé, diligence, malle-poste, fiacre… d’un, deux ou quatre chevaux pour la plupart. Aux heures de pointe, le bruit des fers contre les pavés était, paraît-il, réellement assourdissant. Les encombrements étaient fréquents, provoquant parfois des accidents.
Nietzsche (...) fut assez fou pour pleurer auprès d'un animal, sous le regard ou contre la joue d'un cheval que l'on frappait. Parfois je crois le voir prendre ce cheval pour témoin, et d'abord, pour le prendre à témoin de sa compassion, prendre sa tête dans ses mains...
Jacques Derrida, L'Animal que donc je suis, Paris, Galilée, 2006
Dans les villes ou sur les routes, les chevaux étaient tous les jours dehors pour mener à bon port hommes et marchandises, qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il neige. Une vie de labeur où repos, confort et bien-être n’étaient pas les priorités. Le choc répété des pieds contre le sol, par exemple, engendrait l’apparition de maladies sérieuses, douloureuses et handicapantes ; quant au traitement des chevaux par les cochers, il n’était pas toujours tendre. C’est ce qu’illustre la célèbre anecdote relative au philosophe Friedrich Nietzsche. Lors d'un séjour à Turin, en 1889, en voyant un cheval se faire fouetter injustement et violemment par son cocher, le philosophe courut se jeter au cou de l’animal pour lui apporter son soutien. Peu de temps après, il sombrait dans la folie...