Les exigences de la tradition équestre française reposent sur une même intuition poétique que celle exprimée par Xénophon dans son Art de l’équitation écrit au Ve siècle avant notre ère :

« Si quelqu’un, montant un bon cheval de guerre, veut le faire paraître avantageusement et prendre les plus belles allures, qu’il se garde bien de le tourmenter, soit en lui tirant la bride, soit en le pinçant de l’éperon ou en le frappant avec un fouet, par où plusieurs pensent briller. […] Conduit, au contraire, par une main légère, sans que les rênes soient tendues, relevant son encolure, et ramenant sa tête avec grâce, il prendra l’allure fière et noble dans laquelle d’ailleurs il se plaît naturellement ; car quand il revient près des autres chevaux, surtout si ce sont des femelles, c’est alors qu’il relève le plus son encolure, ramène sa tête d’un air fier et vif, lève moelleusement les jambes et porte la queue haute. Toutes les fois qu’on saura l’amener à faire ce qu’il fait de lui-même lorsqu’il veut paraître beau, on trouvera un cheval qui, travaillant avec plaisir, aura l’air vif, noble et brillant. » (Trad. Paul-Louis Courier, 1834)

Rendre au cheval monté la grâce des attitudes et des mouvements qu’il avait naturellement en liberté…

Depuis la Renaissance italienne, cette « imitation de la nature belle et bonne » et qui ne peut être forcée, inspire l'équitation académique en France qui veut « rendre au cheval monté la grâce des attitudes et des mouvements qu’il avait naturellement en liberté… » (Général Decarpentry, Équitation académique, 1947). La relation harmonieuse avec le cheval, les interventions d’une grande discrétion, la fluidité des mouvements, la flexibilité élastique de tous les ressorts du cheval, la « légèreté » qui en découle donnent une impression d’élégance et de sobriété, voilà la marque de l’équitation française.

Pour atteindre ces objectifs, les écuyers procèdent à la reconstruction posturale du cheval afin de le faire travailler dans un équilibre propice aux mouvements exécutés sur place. Il s’agit du «  rassembler » qui se caractérise par l’engagement des postérieurs dont les pieds se posent au sol à l’aplomb de la pointe de la hanche pour une plus grande prise en charge de la masse, et par le redressement et l’élévation dans le  « ramener » de l’encolure érigée comme une pyramide au-dessus des épaules.